Le magazine des maires et présidents d'intercommunalité
Maires de France


31/08/2021
Administration générale Parlement

Respect des principes de la République : les principales dispositions de la loi

La loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République est parue au JO du 25 août 2021, après la décision du Conseil constitutionnel du 13 août (n° 2021-823 DC) validant l'essentiel de ses dispositions.

Xavier Brivet
Illustration
© Adobestock

 

Respect des principes de neutralité et de laïcité, «contrat d’engagement républicain » signé par les associations, instruction en famille, financement et fonctionnement des lieux de culte et des associations cultuelles…, Maires de France présente une synthèse des principales mesures de la loi du 24 août 2021.


Neutralité et laïcité. La loi étend l’obligation de neutralité et le respect du principe de laïcité, qui s’applique aux agents publics, aux entreprises délégataires d’un service public, aux services de transport de voyageurs et aux bailleurs sociaux, mais aussi à tous les élus : ainsi, «pour les attributions qu’ils exercent au nom de l’État, le maire ainsi que les adjoints et les membres du conseil municipal agissant par délégation du maire dans les conditions fixées à l’article L. 2122-18 sont tenus à l’obligation de neutralité et au respect du principe de laïcité.»  
La loi prévoit notamment que «préalablement à sa prise de fonctions, tout agent de la police municipale déclare solennellement servir avec dignité et loyauté la République, ses principes de liberté, d’égalité et de fraternité et sa Constitution par une prestation de serment. » Les fonctionnaires doivent être formés «au principe de laïcité ». Les collectivités et leurs établissements publics doivent désigner un «référent laïcité ». Celui-ci est «chargé d’apporter tout conseil utile au respect du principe de laïcité à tout fonctionnaire ou chef de service qui le consulte. Il est chargé d’organiser une journée de la laïcité le 9 décembre de chaque année. » Un décret fixera les conditions de sa nomination et ses missions.  

 

Nouvelle infraction. Le texte crée dans le code pénal une nouvelle infraction (art. 433-3-1) : il prévoit qu’« est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende le fait d’user de menaces ou de violences ou de commettre tout autre acte d’intimidation à l’égard de toute personne participant à l’exécution d’une mission de service public, afin d’obtenir pour soi-même ou pour autrui une exemption totale ou partielle ou une application différenciée des règles qui régissent le fonctionnement dudit service ». 
Lorsqu’elle est informée de l’existence d’un risque manifeste d’atteinte grave à l’intégrité physique de l’un de ses agents, «la collectivité publique prend, sans délai et à titre conservatoire, les mesures d’urgence de nature à faire cesser ce risque et à prévenir la réalisation ou l’aggravation des dommages directement causés par ces faits ». 

 

« Déféré-Laïcité ». La loi institue une procédure de «carence républicaine » permettant la suspension par le juge, sur déféré préfectoral, d’un acte pris par une collectivité qui est de nature à "porter gravement atteinte aux principes de laïcité et de neutralité des services publics" (exemples : mise en place d’horaires différenciés dans les équipements municipaux ou instauration de menus communautaires à la cantine).  
 

« Contrat d’engagement républicain ». Toute association ou fondation bénéficiaire de subvention, notamment de la part d’une collectivité locale, devra signer un «contrat d’engagement républicain » par lequel elle s’engage à «respecter les principes de liberté, d’égalité, de fraternité et de dignité de la personne humaine, ainsi que les symboles de la République », «à ne pas remettre en cause le caractère laïque de la République » et à «s’abstenir de toute action portant atteinte à l’ordre public. » Un décret fixera le contenu du contrat et les modalités d’application de ces dispositions.

La violation du contrat d’engagement républicain devait entrainer la restitution de la subvention. Cependant, dans sa décision du 13 août, le Conseil constitutionnel «juge, par une réserve d'interprétation, que ce retrait ne saurait, sans porter une atteinte disproportionnée à la liberté d'association, conduire à la restitution de sommes versées au titre d'une période antérieure au manquement au contrat d'engagement ». 
 

« Instruction en famille ». L'instruction en famille est soumise à une autorisation préalable de l'État, qui remplace la simple déclaration actuelle. Elle est possible pour les «motifs » suivants : l’état de santé de l'enfant ou son handicap, la pratique d'activités sportives ou artistiques intensives, l’itinérance de la famille ou l’éloignement géographique de tout établissement scolaire public, "l’existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif". Avant de délivrer l’autorisation, l’État «peut convoquer l’enfant, ses responsables et, le cas échéant, les personnes chargées d’instruire l’enfant à un entretien afin d’apprécier la situation de l’enfant et de sa famille et de vérifier leur capacité à assurer l’instruction en famille ». L’autorisation prévue le législateur «est accordée de plein droit, pour les années scolaires 2022-2023 et 2023-2024, aux enfants régulièrement instruits dans la famille au cours de l’année scolaire 2021-2022 ». 
Le Conseil constitutionnel a jugé ces dispositions conformes en rappelant que la loi du 28 mars 1882 "n'a fait de l'instruction en famille qu'une modalité de mise en œuvre de l'instruction obligatoire" et non "une composante du principe fondamental reconnu par les lois de la République de la liberté de l'enseignement". Cependant, par une réserve d'interprétation, il juge que les «autorités administratives compétentes » devront «fonder leur décision » en «excluant toute discrimination de quelque nature que ce soit ».
Le maire et le président de conseil départemental seront informés de l’autorisation. Afin de renforcer le suivi de l’obligation d’instruction par le maire et l’État, la loi prévoit que «chaque enfant soumis à l’obligation d’instruction (…) se voit attribuer un identifiant national ». Elle prévoit aussi la création d’« une instance départementale chargée de la prévention de l’évitement scolaire » associant notamment «les services municipaux concernés, le conseil départemental », dont un décret précisera le fonctionnement. 


Mariages, polygamie…. Le texte renforce la lutte contre les mariages forcés. L’officier de l’état civil pourra demander «à s’entretenir individuellement avec chacun des futurs époux lorsqu’il a des raisons de craindre, au vu des pièces fournies par ceux-ci, des éléments recueillis au cours de leur audition commune ou des éléments circonstanciés extérieurs reçus, dès lors qu’ils ne sont pas anonymes, que le mariage envisagé soit susceptible d’être annulé (…) », prévoit la loi. La polygamie devient un motif de retrait ou de refus de titre de séjour. La délivrance de certificats de virginité est interdite. 

 

Construction ou location d’un lieu de culte. La loi autorise une commune ou un département à «garantir les emprunts contractés pour financer la construction, par des associations cultuelles ou, dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, par des établissements publics du culte ou par des associations inscrites de droit local à objet cultuel, d’édifices répondant à des besoins collectifs de caractère religieux ». La commune ou le département doit en informer le préfet de département «au moins trois mois avant » que la garantie soit accordée. » En matière de délivrance des permis de construire, la loi insère un nouvel article (L. 422-5-1) dans le code de l’urbanisme prévoyant que « lorsque le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale est compétent, il recueille l'avis du représentant de l'Etat dans le département si le projet porte sur des constructions et installations destinées à l'exercice d'un culte. »

Concernant la location, «lorsque le bail a pour objet l’affectation à une association cultuelle d’un édifice du culte ouvert au public », la collectivité territoriale informe le préfet de département de son intention de conclure un tel bail «au moins trois mois avant sa conclusion. »
La loi prévoit que «l’aliénation d’un local servant habituellement à l’exercice public d’un culte consentie directement ou indirectement à un État étranger, à une personne morale étrangère ou à une personne physique non résidente en France est subordonnée, à peine de nullité, à une déclaration préalable à l’autorité administrative », qui peut s’y opposer.

 

Fonctionnement du lieu de culte. «Il est interdit de tenir des réunions politiques dans un local servant habituellement à l’exercice du culte » ou dans ses dépendances, «d’y afficher, d’y distribuer ou d’y diffuser de la propagande électorale, que ce soit celle d’un candidat ou d’un élu », ou d’y organiser «des opérations de vote pour des élections politiques françaises ou étrangères ».
La loi réprime sévèrement «un discours prononcé ou un écrit affiché ou distribué publiquement dans les lieux où s’exerce le culte » contenant notamment «une provocation à résister à l’exécution des lois ou aux actes légaux de l’autorité publique ». Le préfet de département «peut prononcer la fermeture temporaire des lieux de culte dans lesquels les propos qui sont tenus, les idées ou théories qui sont diffusées ou les activités qui se déroulent provoquent à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes ou tendent à justifier ou à encourager cette haine ou cette violence. »

 

Associations cultuelles. La loi renforce l’encadrement de leur création et de leur financement, notamment par un Etat étranger. Elles ne peuvent, sous quelque forme que ce soit, «recevoir des subventions de l’État ni des collectivités territoriales ou de leurs groupements ». «Ne sont pas considérées comme subventions les sommes allouées pour réparations ainsi que pour travaux d’accessibilité aux édifices affectés au culte public, qu’ils soient ou non classés monuments historiques », précise la loi. 

 

Marchés publics. La loi impose au titulaire d’un contrat qui lui confie l’exécution d’un service public (et aux sous-traitants) d'assurer l'égalité des usagers devant le service public et de veiller au respect des principes de laïcité et de neutralité du service public. La loi impose également que les clauses des marchés publics et des contrats de concession précisent en outre les modalités de contrôle et de sanction du cocontractant lorsque celui-ci ne prendrait pas les mesures adaptées pour mettre en œuvre ces obligations et faire cesser les éventuels manquements constatés. Cette obligation s’applique aux contrats pour lesquels une consultation a été engagée ou un avis de publicité envoyé à la publication à compter du 25 août 2021.
Les contrats pour lesquels une consultation ou un avis de publicité était en cours au 25 août 2021, ainsi que les contrats en cours à cette même date, doivent être modifiés en ce sens si le terme de ces contrats intervient après le 25 février 2023. L‘Etat accorde un délai aux autorités contractantes jusqu’au 25 août 2022. La Direction des affaires juridiques (DAJ) a précisé sur son site les modalités d'application de ces dispositions qui feront l’objet d’une prochaine circulaire. 

 

Discours de haine et contenus illicites en ligne. « Le fait de révéler, de diffuser ou de transmettre, par quelque moyen que ce soit, des informations relatives à la vie privée, familiale ou professionnelle d’une personne permettant de l’identifier ou de la localiser aux fins de l’exposer ou d’exposer les membres de sa famille à un risque direct d’atteinte à la personne ou aux biens que l’auteur ne pouvait ignorer est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.

« Lorsque les faits sont commis au préjudice d’une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public ou titulaire d’un mandat électif public ou d’un journaliste, (…), les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende. La loi renforce notamment les obligations des plateformes en ligne pour lutter contre les propos haineux.

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