01/05/2019
Europe

Gdansk : une maire symbole de tolérance

Élue maire début mars après l'assassinat de son prédécesseur, Aleksandra Dulkiewicz incarne la mobilisation des élus locaux polonais contre les populismes.

Aleksandra Dulkiewicz, maire de Gdansk, veut préserver un modèle de vivre-ensemble
Pour les participants du Sommet européen des régions et villes, auquel elle était invitée mi-mars, à Bucarest, Aleksandra Dulkiewicz est une figure de la résistance au populisme. « Je suis une fille de Gdansk, enracinée dans ses valeurs et totalement connectée à ma ville : c’est donc difficile de me voir comme un “symbole” international », modère cependant cette jeune femme de 39 ans, élue maire de Gdansk, le 3 mars, avec 82 % des voix. Elle est pourtant un symbole en raison des circonstances de son élection, suite à l’assassinat, le 13 janvier 2019, de Pawel Adamowicz dont elle a été la collaboratrice pendant plusieurs années avant d’être son adjointe en 2017, en charge de la politique économique, puis sa directrice de campagne lors des élections municipales de 2018. 
Catholique et fille d’opposants au régime communiste, lorsque ­Solidarnosc faisait la Une des journaux occidentaux, Aleksandra ­Dulkiewicz se revendique comme un « pur produit » de la ville. Aujourd’hui, elle défend le message de tolérance de son prédécesseur : alors que l’atmosphère est aux rejets des différences en Pologne, « Gdansk se veut un modèle de vivre-ensemble, quel que soit l’âge, le sexe, le handicap. Nous travaillons sur l’information. Nous investissons dans l’infrastructure. Nous faisons un travail social. » 
Élégante et affirmée, cette juriste est aussi le symbole de cette Pologne « qui réussit » depuis l’entrée du pays dans l’Union européenne, il y a quinze ans. Avec 3 % de chômage, « sa » ville bénéficie de l’essor économique du pays. Elle-même se revendique comme « une Européenne de la génération ­Erasmus » en répondant tour à tour en allemand, en anglais ou en italien à ses interlocuteurs. 

Défendre ses valeurs
« Si j’ai un message à faire passer aux élus locaux après la mort de Pawel Adamowicz, c’est qu’il faut se battre pour l’Europe, non pour recevoir de l’argent mais pour défendre ses valeurs de solidarité », a-t-elle plaidé lors du sommet. Un engagement qui fait, selon elle, la force des élus locaux polonais aujourd’hui. « Le rôle des maires est renforcé depuis l’arrivée du parti ultra-conservateur au pouvoir Droit et justice. Ils ne sont plus seulement ceux qui construisent des routes et des écoles, mais ceux qui défendent aussi des valeurs essentielles pour les communautés locales : le respect de l’État de droit, de l’indépendance de la justice, la solidarité… »
Pour l’instant, la constitution leur donne assez d’autonomie pour le faire, assure-t-elle. L’assassinat de Pawel Adamowicz a aussi créé un choc qui a adouci l’atmosphère politique au sein du conseil municipal. « Nous souffrons toujours de sa mort mais le débat est devenu moins violent, les gens se parlent. C’est très perceptible au niveau local », assure Aleksandra Dulkiewicz. Les élections législatives de l’automne prochain diront si c’est aussi le cas au niveau national, espère-t-elle. 

Nathalie STEIWER
n°368 - Mai 2019