Juridique
01/03/2019
Élections

Opérations électorales : les nouvelles dispositions

Les élections européennes auront lieu le 26 mai 2019. Plusieurs nouveautés relatives à l'organisation des opérations de vote sont entrées en vigueur en 2019.

Répertoire électoral unique (REU), justification de l’identité lors du vote, carte d’électeur, surveillance des opérations électorales…, Maires de France revient sur les principales évolutions à deux mois du scrutin européen.

1 Le répertoire électoral unique (REU)
Le répertoire électoral unique, piloté par l’INSEE aux seules fins de gestion des listes électorales, est opérationnel depuis le 3 janvier 2019. Ce système d’information intégré centralise les modifications réalisées sur les listes électorales, notamment par les communes. Il permet des échanges d’information plus rapides et plus fiables. Il offre la possibilité de s’inscrire à n’importe quel moment sur les listes, les années sans scrutin, et, les années comprenant une élection, jusque très près de la date du scrutin. 
La gestion directe de certains processus par l’INSEE allège la charge des communes. Depuis le début de l’année, celles-ci procèdent aux inscriptions et aux radiations directement via le système REU. Les listes électorales, devenues permanentes, sont extraites de ce système. Pour chaque bureau de vote, la commune exporte la liste d’émargement et l’imprime.
Pour rappel, les principales fonctionnalités du système sont les suivantes :
Inscription. La commune saisit directement l’inscription d’un électeur via ce système de gestion qui vérifie la régularité de l’inscription validée par le maire et l’intègre dans le REU. Si l’électeur est décédé ou frappé d’une incapacité électorale, la prescription d’inscription du maire n’est pas validée dans le REU et la commune en est informée.
À titre transitoire, entre le 1er janvier 2019 et le 1er janvier 2020, les demandes d’inscription sur les listes électorales peuvent être déposées au plus tard jusqu’au dernier jour du deuxième mois précédant un scrutin. 
Pour les élections européennes du 26 mai 2019, la date limite d’inscription était donc le 31 mars 2019.  
Les électeurs non-inscrits au 31 mars ne pourront donc pas voter aux européennes (sauf cas particuliers habituels, prévus à l’article L30 du Code électoral : ex-fonctionnaires ou militaires mutés…).
Ils pourront toutefois juste après cette date et jusqu’au sixième vendredi précédant les élections municipales (37 jours avant le scrutin) s’inscrire pour pouvoir voter aux élections municipales. 
Radiations. Les radiations volontaires à l’initiative de la commune sont notifiées par les communes au système de gestion qui les intègre dans le REU. Le système de gestion procède directement à la radiation d’office des électeurs décédés ou ayant perdu leur capacité électorale. Les électeurs radiés ne sont pas exclus du REU, excepté ceux qui sont décédés : leur rattachement à une commune ou à un consulat est suspendu.
Inscriptions d’office. L’INSEE inscrit d’office les jeunes atteignant l’âge de 18 ans et les personnes ayant acquis la nationalité française sur la liste électorale de la commune. Il appartient au maire de les radier s’il constate l’absence de rattachement communal.
Élections européennes. Le REU permet de prévenir le double-vote en mettant en évidence la liste des ressortissants français inscrits sur les listes électorales d’un autre État membre, qui ne peuvent donc pas voter pour un représentant français pour les élections européennes.
Inversement, le REU permet également d’extraire, aux fins de transmission aux autres États membres, la liste de leurs ressortissants votant en France, pour éviter qu’ils votent aussi dans leur pays d’origine. 
Édition. Les communes peuvent exporter et éditer non seulement la liste électorale sous forme numérique mais également tous les mouvements (inscriptions et radiations) intervenus à une date donnée. Le système de gestion propose en outre un indicateur de suivi. Il permet d’imprimer les listes d’émargement.

2 Titres d’identité acceptés pour voter
Dans les communes de moins de 1 000 habitants, la présentation d’une pièce d’identité n’est pas obligatoire pour voter (l’AMF avait obtenu cette souplesse en 2014).
En revanche, dans les communes de 1 000 habitants et plus, un titre d’identité et la carte d’électeur doivent être présentés au moment de voter. 
Jusqu’à novembre 2018, l’électeur pouvait présenter un passeport ou une carte d’identité en cours de validité ou périmé, un permis de conduire (y compris sous le format papier de couleur rose), la carte famille nombreuse, la carte du combattant (couleur chamois ou tricolore) ou un livret de circulation délivré par le préfet pour les personnes sans domicile ni résidence fixes.
Un arrêté du 16 novembre 2018 est cependant venu modifier la liste des pièces admissibles. En vertu de ce texte, les passeports et cartes d’identité doivent être en cours de validité ou périmés depuis moins de cinq ans, seul le permis de conduire «sécurisé et conforme au format Union européenne » est admis, la carte famille nombreuse n’est plus recevable, de même que la carte du combattant sans photo. Le livret de circulation délivré par le préfet pour les personnes sans domicile fixe ne figure plus non plus dans la liste, et pour cause : il a été supprimé depuis la loi égalité et citoyenneté du 27 janvier 2017.
Cet arrêté n’a fait l’objet d’aucune information particulière auprès des communes. L’AMF s’est inquiétée auprès du ministère de l’Intérieur des conséquences de ces nouvelles règles sur la participation aux scrutins. En effet, beaucoup d’électeurs âgés ne disposent par exemple que de titres périmés ou anciens, comme des permis de conduire papier. Or, ils comptent, traditionnellement, parmi les électeurs qui s’abstiennent le moins. Dans un contexte où, de surcroît, l’obtention d’une pièce d’identité est devenue plus complexe, plus longue et suppose très souvent un déplacement, l’AMF avait donc des raisons de craindre un impact de ces décisions sur la participation des électeurs aux prochaines élections.
Un courrier adressé par le ministre de l’Intérieur, le 13 février dernier, au président de l’AMF est cependant venu rassurer les maires, en les invitant à appliquer les nouvelles règles «avec discernement » (lire ci-dessus).

3 Cartes d’électeur
Pour mémoire, un décret du 14 mai 2018 a modifié, à la marge, les conditions d’établissement de la carte électorale. Elle est toujours établie par le maire, mais « l’identifiant national d’électeur » découlant de la création du REU y figure désormais. Selon les informations fournies par la circulaire du 12 juillet 2018, ces cartes seront éditées et envoyées ou remises entre le 31 mars 2019 (date limite d’inscription) et, au plus tard, le 26 mai 2019 (jour du scrutin). 

4 Surveillance des opérations électorales
La question du manque de ressources humaines pour la surveillance des opérations est un sujet récurrent à chaque élection. Il est pourtant réglé par le droit électoral.
Être membre d’un bureau de vote est en effet une obligation pour les élus municipaux.  Si un élu se refuse, sans une excuse solide, à assurer cette fonction qui lui est dévolue par la loi, le tribunal administratif pourra le déclarer démissionnaire d’office. La jurisprudence montre que le juge n’hésite pas à appliquer cette sanction.
Pour rappel, l’article R. 42 du Code électoral dispose que les bureaux de vote sont composés d’un président, d’au moins deux assesseurs et d’un secrétaire. L’article R. 43 précise que le président est le maire, un de ses adjoints ou un conseiller municipal. À défaut, il peut être désigné par le maire parmi les électeurs de la commune.
Les assesseurs sont désignés par les différents candidats parmi les électeurs. Chaque candidat ou liste a le droit de désigner un seul assesseur. Le jour du scrutin, si leur nombre est inférieur à deux, les assesseurs manquants sont pris parmi les conseillers municipaux ou parmi les électeurs présents. Le secrétaire est lui aussi choisi parmi les électeurs de la commune. Afin d’assurer un suivi satisfaisant des opérations de vote, la loi électorale exige qu’au moins deux membres du bureau de vote soient présents en permanence.

Pour en savoir plus  
Note détaillée sur la réforme électorale entrée en vigueur au 1er janvier 2019, rédigée par le département Administration et gestion communale de l’AMF. 
À télécharger sur le site internet de l’AMF, www.amf.asso.fr (réf. BW25500).


Inscriptions électorales : un outil performant
Le ministère de l’Intérieur a mis en place sur service-public.fr un outil dont les maires ont tout intérêt à faire connaître l’existence à leurs administrés. Il s’agit d’une télé-procédure, rapide et très simple d’utilisation, dénommée «ISE » (pour «interrogation de sa situation électorale ») permettant à tout électeur de savoir s’il est bien inscrit sur les listes électorales et dans quel bureau il doit voter. Les électeurs qui le souhaitent n’auront ainsi plus besoin de solliciter les services de la commune pour avoir ces renseignements. C’est l’une des premières traductions concrètes du répertoire électoral unique (REU). www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/services-en-ligne-et-formulaires/ISE 


Pièces d’identité : les précisions du ministre de l’Intérieur
Le 13 février 2019, le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, a adressé une lettre au président de l’AMF pour faire machine arrière sur les pièces d’identité et rassurer les maires (1). Il y affirme qu’il reste possible, pour les électeurs, de présenter un permis de conduire en papier rose, «et ce jusqu’en 2033 », date à laquelle tous les anciens permis devront avoir été remplacés. Le ministre reconnaît que le terme employé dans l’arrêté du 16 novembre 2018 pouvait «prêter à confusion » et explique que l’expression «permis sécurisé conforme au format Union européenne » a été utilisée pour une simple raison de terminologie. 
Le ministre appelle les maires à faire preuve de «souplesse et de discernement » dans l’application des nouvelles règles concernant les titres d’identité. Une pièce d’identité périmée depuis plus de cinq ans pourra éventuellement être acceptée «lorsque les traits de la personne figurant sur le document d’identité sont aisément reconnaissables ». Le ministre a promis qu’une circulaire serait prochainement diffusée aux maires, en reprenant toutes ces précisions.
Compte tenu de ces dernières informations, voici la liste des douze documents admis pour justifier de l’identité d’un électeur : carte d’identité ou passeport en cours de validité ou périmés depuis moins de cinq ans (sauf donc, de façon un peu exceptionnelle, si la personne est aisément reconnaissable sur la photo), récépissé délivré aux personnes en situation de contrôle judiciaire, ou l’un des huit documents suivants, devant être munis d’une photo et en cours de validité : carte d’identité de parlementaire, carte d’identité d’élu local, carte vitale, carte du combattant, carte d’invalidité ou mobilité-inclusion, carte d’identité de fonctionnaire, permis de chasser délivré par l’ONCFS.  (1) www.amf.asso.fr (réf. BW39239).


Références
• Décret du 09/05/2018 portant sur la création du répertoire électoral unique pris en application de la loi du 01/08/2016. 
• Décret du 14/05/2018 portant application de la loi organique du 01/08/2016 et de la loi du 01/08/2016.
• Circulaire du ministère de l’Intérieur du 12/07/2018.
• Arrêté du 16/11/2018 pris en application des articles R. 5, R. 6 et R. 60 du Code électoral.
• Circulaire du ministère de ­l’Intérieur du 21/11/2018.


Pour en savoir plus  
Note détaillée sur la réforme électorale entrée en vigueur au 1er janvier 2019, rédigée par le département Administration et gestion communale de l’AMF. 
À télécharger sur le site internet de l’AMF, www.amf.asso.fr (réf. BW25500).
 

Fabienne NEDEY
n°366 - Mars 2019