Dossiers et enquêtes
01/04/2019
Environnement

Eau : la mise en œuvre complexe de la Gemapi

Depuis le 1er janvier 2018, la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (Gemapi) est une compétence exclusive et obligatoire dévolue aux intercommunalités.

Mais beaucoup de territoires n’ont pas encore achevé de régler les questions d’organisation, alors que de premières échéances réglementaires approchent.

Depuis le 1er janvier 2018, la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (Gemapi) est une compétence obligatoire transférée aux intercommunalités à fiscalité propre. Ce transfert, opéré par la loi Maptam de 2014, est un cadeau empoisonné. Derrière la volonté affichée de réduire la vulnérabilité et de mettre un terme à l’émiettement des interventions en matière de gestion des cours d’eau et de lutte contre les inondations, il constitue en effet un glissement de responsabilités et de charges de l’État vers les collectivités locales. Or, ces charges promettent d’être lourdes. Pour les digues, le chiffre de 40 Mds€ de travaux a été avancé, très incertain compte tenu du grand nombre d’inconnues qui perdurent : sur le linéaire et l’état des digues et autres ouvrages assurant une fonction de protection qui ont été transférés ou le seront au futur, sur les choix de protection que feront les collectivités, etc. C’est pourquoi l’AMF avait demandé au gouvernement, dès 2014, que «le financement des digues et la responsabilité qui en découle » demeurent «à la charge de l’État qui devrait mettre en œuvre des moyens financiers appropriés pour accompagner les territoires, au rebours des ponctions opérées par l’État sur les budgets d’intervention des agences de l’eau » (1). Le volet «gestion des milieux aquatiques » n’a, lui, pas été évalué. Il a parfois été considéré, à tort, comme le parent pauvre de cette nouvelle compétence, la dimension inondations ayant, au départ, préempté les autres aspects. À ce jour, les contours de cette partie restent d’ailleurs encore flous. 

17,1 millions   d’habitants sont exposés directement au risque d’inondations par débordement de cours d’eau et 1,4 million sont exposés au risque de submersion marine.
Source : ministère de l’Environnement, 2011.

Dans ce contexte, la loi du 30 décembre 2017 (2) a permis de sortir de plusieurs ornières. Elle a confirmé la «sécabilité » de la compétence. C’est-à-dire qu’un EPCI peut la transférer en tout ou partie à un syndicat, sur une portion ou l’intégralité de son territoire. «Cela a eu le mérite de clore le débat sur le découpage des compétences. Face aux positions dogmatiques de certains services de l’État, il a quand même fallu qu’une loi vienne confirmer ce que les juristes indiquaient être l’état du droit », souligne l’avocat Yann Landot. Cette loi a aussi levé les interdictions empêchant les départements et les régions qui le souhaitent de continuer à assurer, au-delà de 2020, des missions relevant de la Gemapi (assistance technique aux gestionnaires, soutien financier). Le décret du 21 février 2019 (3) permet aux départements et régions, à titre dérogatoire, de continuer à gérer des ouvrages de prévention des inondations dans le cadre d’une convention avec l’EPCI concerné.
Dernière nouveauté en date : un décret du 27 décembre 2018 est venu prolonger, jusqu’au 1er janvier 2020, l’action des missions d’appui technique de bassin. C’est une bonne nouvelle dans la mesure où les besoins d’accompagnement des collectivités compétentes en matière de Gemapi apparaissent, à ce jour, toujours très forts.

Diversité des territoires
Concrètement, dresser un état des lieux de la mise en œuvre de la compétence est un exercice compliqué compte tenu de la diversité des situations sur le terrain. Sur certains territoires, des structures préexistaient, il y avait donc déjà de la connaissance et des moyens mis en œuvre. L’existence de syndicats très expérimentés dans la maîtrise d’ouvrage sur les digues (comme le Syndicat mixte interrégional d’aménagement des digues du delta du Rhône et de la mer) faisait figure d’exception. D’autres territoires étaient « mâtures » dans leur organisation institutionnelle et au regard des missions déjà exercées, comme le Syndicat mixte d’aménagement de l’Arve et de ses affluents (74). Dans l’Aude, une organisation structurée avait peu à peu émergé après la crue centennale de 1999 ; sa mutation s’est affinée avec la Gemapi… Ailleurs, des communautés d’agglomé­ration comme Val-de-Garonne (47) et ­certaines métropoles, dont celle de ­Bordeaux, se sont saisies de la compétence de façon anticipée dès 2015 ou 2016.
En revanche, les zones où il n’y avait pas de précédent, et où il n’y avait pas d’acteur en capacité de s’imposer naturellement, étaient bien plus nombreuses. Beaucoup de ces territoires semblent donc avoir encore du mal à régler les questions d’organisation territoriale. La phase de mise en place de la gouvernance empêche d’entrer dans le vif du sujet : la définition de programmes d’actions, le financement (avec la possibilité d’instaurer une taxe pour financer la compétence), l’organisation administrative et technique… 


(1) www.amf.asso.fr (réf. BW25120). (2) Loi du 30/12/2017 relative à l’exercice des compétences des collectivités territoriales dans le domaine de la ­gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations. (3) Décret du 21/02/2019 portant diverses dispositions d’adaptation des règles relatives aux ouvrages hydrauliques.

Trois questions à...  André Flajolet,  
maire de Saint-Venant (62), président de la commission 
transition écologique de l’AMF
« La Gemapi segmente la cohérence d’intervention »
Quelle est l’échelle territoriale pertinente pour travailler sur la Gemapi ?
Avoir une cohérence d’intervention à l’échelle d’un bassin versant ou d’un sous-bassin versant significatif est une priorité car la réalité hydrographique s’impose à nous : l’eau ne respecte pas les limites administratives. L’échelle de bassin versant est la seule ayant du sens pour exercer l’ensemble des solidarités : amont-aval, urbain-rural, étiages-inondations… Or, la Gemapi, telle qu’elle a été mise en place, segmente artificiellement cette cohérence. Elle risque donc d’entraîner en réalité plus de désorganisation de la gestion du grand cycle de l’eau.

Outre l’incohérence hydrogéographique, vous pointez souvent une incohérence thématique. Pourquoi ?
La GEMAPI ne concerne que quatre items de l’article L. 211-7 du Code de l’environnement. 
Elle laisse de côté plusieurs autres alinéas relatifs, entre autres, à la maîtrise des eaux pluviales ou à la lutte contre l’érosion des sols, alors qu’ils revêtent énormément d’importance en matière de prévention des inondations. À mon sens, les réponses à toutes les questions stratégiques qui se posent sur la prévention des inondations et des étiages, la préservation de la ressource, l’adaptation au changement climatique, etc., résident dans l’actualisation des SAGE (schémas d’aménagement et de gestion des eaux) et des SDAGE (schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux). 

Les budgets des agences de l’eau permettront-ils d’aider les collectivités à réaliser les travaux indispensables ?
En 2019, les agences ont perdu 16 % de leur capacités d’investissement et d’ici à 2021, ce sont 20 % des personnels, donc de la matière grise des agences, qui vont disparaître. Nous demandons avec obstination au ministère de la Transition ­écologique et solidaire de revoir sa copie sur les aspects financiers de la gestion de l’eau dans le cadre des Assises de l’eau.

Gemapi : les gestionnaires confrontés à de nombreuses interrogations

Depuis ses débuts, la Gemapi soulève des inconnues. Elles persistent ou bien se renouvellent, au fur et à mesure que le chantier avance. 

L’une des plus importantes questions concerne l’ampleur des besoins financiers en jeu. Lors des débats parlementaires, la création de cette nouvelle compétence n’avait pas fait l’objet d’une étude d’impact financière. « On n’a jamais vu un transfert se faire sans évaluation, sans état des lieux… et sans compensation », note Lionel Quillet, vice-­président du conseil départemental de Charente-Maritime.


SYMADREM BG

 

La situation ne s’est pas clarifiée. La loi Fesneau du 30 décembre 2017 prévoyait la présentation d’un rapport devant le Parlement, en juin 2018, sur la mise en œuvre de la Gemapi et ses conséquences pour la gestion des fleuves, des zones côtières, des digues domaniales ainsi que les zones de montagne et les territoires ultramarins. Les collectivités espéraient qu’il permettrait une évaluation financière de la charge transférée. Mais ce rapport n’est pas sorti en temps et en heure. Selon des sources bien informées, ce document serait en cours de transmission aux parlementaires. Aucune information n’a filtré sur son contenu. 

439  intercommunalités lèvent en 2019 la taxe Gemapi.
Moins de 70 l’avaient mise en place en 2018. 

Source : Direction générale des finances publiques, 2018.

Gestion des digues
Outre ces questions, le manque de visibilité est criant sur d’autres aspects. La question des digues orphelines (dépourvues de propriétaires) reste entière. Concernant les transferts d’ouvrages, il n’y a pas d’informations agrégées sur le linéaire de digues communales qui ont été automatiquement mises à disposition des autorités gestionnaires de la Gemapi au 1er janvier 2018, ni sur l’état du conventionnement avec les départements sur les ouvrages devant être transférés au plus tard en 2020. Il n’y a pas de vision globale sur les digues domaniales, qui peuvent faire l’objet d’une mise à disposition jusqu’en 2024. Des conventions doivent définir l’étendue notamment des moyens que l’État met en œuvre pour les remettre en état avant leur transfert. 
Dans le Loiret, des conventions ont été signées en 2018. « Les services de l’État au niveau départemental nous ont proposé un modèle de convention, sur lequel nous avons réclamé des amendements, témoigne Natacha Billet, directrice environnement et prévention des risques à Orléans Métropole. Le modèle signé intégrait toutes nos demandes, par exemple sur la remise d’un rapport annuel d’activité, sur la clarification de l’articulation des rôles dans la régularisation des systèmes d’endiguement, etc. Depuis, la direction départementale des Territoires respecte ce qui a été convenu. En matière de travaux, l’engagement de l’État est de maintenir le niveau de protection identifié dans les études de dangers antérieures. »
Une étape importante se profile en fin d’année du fait des premières échéances fixées par le décret «digues » du 12 mai 2015. Les gestionnaires Gemapi doivent en effet déposer auprès des services de l’État le dossier d’autorisation administrative pour les digues classées A et B avant le 31 décembre 2019 (ou 2021 pour les digues classées C). 

Niveau de protection
À cette occasion, ils devront déclarer les « systèmes d’endiguement » qu’ils prennent en charge, définir la zone protégée correspondante et un niveau de protection (par exemple, une crue centennale). « La Gemapi n’implique pas la reprise systématique de tous les ouvrages de protection présents sur un territoire, explique Marie-France Beaufils, maire de Saint-Pierre-des-Corps et vice-présidente du Centre européen de prévention du risque inondation (CEPRI). Elle ne suppose pas non plus forcément des travaux pour augmenter le niveau de protection. Ce sont les autorités gestionnaires qui feront le choix, en retenant les ouvrages qu’elles jugent utiles à la protection, selon la zone qu’elles veulent protéger et le niveau de protection sur lequel elles sont prêtes à s’engager. »
Ceci soulève d’ailleurs une question : les ouvrages qui ne figureront pas dans le système d’endiguement finalement retenu devront être « neutralisés », afin de laisser passer l’eau de nouveau. Mais s’agissant des digues communales transférées automatiquement aux EPCI à l’entrée en vigueur de la compétence, à qui incombera cette charge ? Il apparaît évident à ce stade que le respect des premières échéances du décret digues est compromis, compte tenu des retards pris dans l’organisation institutionnelle et du temps nécessaire pour boucler les études, les documents techniques et réglementaires très lourds. Conscient de cette situation, le ministère de la Transition écologique et solidaire prépare un décret qui devrait ouvrir la possibilité de reporter d’un an l’échéance, sur demande expresse déposée devant le préfet avant la date butoir. « Ce projet de décret inclut de nombreuses autres dispositions qui viennent rectifier des oublis ou des aberrations du décret “digues” que nous pointions de longue date (permettre à des associations syndicales d’être gestionnaires de systèmes d’endiguement, étude de dangers simplifiée pour les aménagements hydrauliques, etc.) », ajoute Stéphanie Bidault, directrice du CEPRI. La date de parution de ce texte, actuellement en consultation, est encore inconnue.

Coordination des structures
Dans le même temps, de nouvelles préoccupations émergent concernant la coordination entre les structures gestionnaires de la Gemapi et les autres acteurs. Par exemple, en matière d’articulation entre les missions du gestionnaire et les pouvoirs de police du maire, sur la coordination en situation de crue entre l’autorité compétente sur la Gemapi, l’État et la commune, ou encore, en matière d’entretien des cours d’eau, sur l’articulation entre l’exercice de la compétence Gemapi et les obligations des propriétaires riverains. « Il y a des progrès à faire en matière de coordination sur ces questions qui se situent aux frontières des missions des uns et des autres et qui entraînent des responsabilités partagées. Nous envisageons par exemple de travailler, sur notre territoire, à l’établissement d’un document clarifiant la chaîne d’information et permettant d’avoir une réactivité optimale en cas de crise », témoigne Valérie Petex, vice-­présidente de la communauté de communes Le Grésivaudan (38).
Dernier point à aborder : les premières reconnaissances officielles d’Epage (établissement public d’aménagement et de gestion des eaux). En janvier dernier, l’Epage du bassin du Loing (couvrant des communes du Loiret, de l’Yonne et de la Seine-et-Marne) a été désigné comme tel par arrêté préfectoral. En février, un arrêté préfectoral a validé la transformation en Epage du Syndicat de la basse vallée de l’Ain, dans le bassin Rhône-Méditerranée. La doctrine adoptée sur ce bassin va au-delà de la loi : elle demande à ce que la structure candidate exerce la totalité de la compétence Gemapi et, qui plus est, de préférence par transfert plutôt que par délégation. Ceci soulève une question d’équité territoriale, dès lors que des règles différentes selon les bassins conditionnent l’obtention du « label » Epage. A fortiori si, à terme, celui-ci devient incontournable pour que les structures maîtres d’ouvrage en Gemapi accèdent à des subventions.    

 

Yann Landot,
avocat au cabinet Landot & associés

« L’organisation institutionnelle peine à se stabiliser »

« L’état d’avancement de la mise en place opérationnelle de la compétence dans les territoires est très hétérogène. Mais je constate que dans beaucoup de secteurs, l’organisation institutionnelle tarde à se stabiliser : on en est encore souvent à boucler les réflexions sur la gouvernance, sur les périmètres, sur les aspects statutaires, etc. Je m’attendais à ce que, cette année, les préoccupations évoluent plus vers des sujets relatifs aux contours de la Gemapi (définir concrètement ce qui est dedans et ce qui est en dehors), vers l’accompagnement du portage de dossiers d’Epage, la préparation des dossiers de définition des systèmes d’endiguement, etc. Bref, ce qui relève plus de l’exercice concret. C’est le cas pour certains gestionnaires, mais c’est loin d’être une généralité. Pour les plus avancés, il y a maintenant beaucoup de questions sur l’articulation avec les responsabilités et les obligations des autres acteurs, ainsi que sur la différence entre « l’obligation » d’intervenir pour les autorités en charge de la Gemapi et la « possibilité » de le faire, ce qui n’est pas tout à fait pareil en matière de responsabilités. Par ailleurs, au vu de l’état des lieux général, je crains que la plupart des territoires ne soient pas à l’heure pour la définition des systèmes d’endiguement, fin 2019. »


Focus sur la taxe Gemapi
En 2019, 35 % des communautés et métropoles ont décidé de lever la taxe Gemapi (1) pour financer les travaux de prévention du risque d’inondation. 
Le recours à ce moyen de financement progresse donc, malgré le contexte de ras-le-bol fiscal général, malgré les nombreuses imperfections de cette taxe pointées par le rapport Richard-Bur, malgré le fait que son produit ne couvre, au mieux, qu’une fraction de l’énorme besoin de financement de la Gemapi… Les produits levés varient fortement d’un territoire à l’autre : le montant national moyen s’élève en 2019 à 8,20 € par habitant (bien en dessous du plafond fixé par la loi à 40 € par habitant), la fourchette s’étalant de 0 à 16 €. Pour rappel, le devenir de cette taxe additionnelle facultative aux taxes foncières sur le bâti et le non bâti, à la cotisation foncière des entreprises et à la taxe d’habitation, n’a toujours pas été clarifié à l’issue de la disparition de la taxe d’habitation après 2020. 

(1)    L’AMF a publié une note sur les modalités de détermination et le calcul de la taxe gemapi. www.amf.asso.fr (réf. CW25577).


Isère : les intercommunalités confient la Gemapi à un syndicat

Le Syndicat mixte des bassins hydrauliques de l'Isère (Symbhi) assure les missions relevant de la surveillance et de l'entretien des digues des grandes rivières.

Longue de 286 km, la rivière Isère prend sa source dans le massif des Alpes et termine sa course dans le Rhône, en traversant trois départements. Sur celui de l’Isère, l’exercice de la compétence Gemapi incombe à quatre syndicats, dont le Syndicat mixte des bassins hydrauliques de l’Isère (Symbhi) (1) qui a opéré une mue au 1er janvier 2019. Cette structure prenant en charge des travaux d’aménagement pour protéger des inondations et restaurer les rivières a fusionné avec l’Association départementale Isère Drac Romanche (gestionnaire de digues depuis 1936) et le Sigreda (Syndicat intercommunal de la Gresse, du Drac et de leurs affluents).


SR3A
Chantier de restauration de cours d'eau en agglomération mêlant protection des lieux habités (1), restauration du fonctionnement du ruisseau (2), et création de zones d'expansion des crues par désimperméabilisation (3) en centre urbain (Oyonnax).

Outre les grands travaux d’aménagement, il assure ainsi désormais aussi les missions relevant de la surveillance et de l’entretien des digues des grandes rivières. Les communautés de communes du Trièves, de la ­Matheysine et du Grésivaudan lui ont confié leurs missions Gemapi (transfert de compétence pour le Grésivaudan et fusion Sigreda – Symbhi sur le secteur Drac). La métropole de Grenoble également, même si elle conserve la gestion des affluents de l’Isère sur son territoire (hors secteur Drac – Gesse).
Le Symbhi est donc maintenant en charge de toutes les missions publiques de gestion des rivières sur ces territoires. «C’est un changement de périmètre géographique et un changement essentiel dans les missions exercées, en bénéficiant d’un réel effet de synergie. Par exemple, les compétences de l’AD seront très utiles pour la mise aux nouvelles normes des digues sur le secteur Grésivaudan », relève Fabien Mulyk, président du Symbhi.
Le département de l’Isère a été le chef d’orchestre de cette structuration, dans laquelle le rôle des EPCI en charge de la Gemapi a aussi été crucial. « Le cadre de travail proposé était très favorable au transfert complet de la compétence », témoigne Valérie Petex, vice-présidente de la communauté de communes Le ­Grésivaudan, territoire sur lequel les enjeux de prévention des inondations sont très prégnants. La communauté avait pris la compétence Gemapi dès 2015, instauré la taxe, rédigé un schéma directeur identifiant des actions prioritaires. 
Une gouvernance partagée a été mise au point, le Symbhi s’engageant à consulter et rendre compte de la mise en œuvre du schéma directeur à la communauté. Les travaux d’entretien (fonctionnement) et  structurels (investissement) seront réalisés progressivement. « Le Symbhi s’est engagé à ce que la fiscalité Gemapi levée sur le territoire de la communauté soit utilisée dans des actions menées dans ou au bénéfice du Grésivaudan : la taxe levée bénéficiera donc bien au territoire intercommunal », précise Valérie Petex. « Le Symbhi a des équipes solides, et c’est encore plus vrai dans sa nouvelle configuration. On travaille donc dans une logique de confiance », souligne Fabien Mulyk.   

(1) http://symbhi.fr/ 

Rivières : la Vallée de l’Ain s’appuie sur un EPAGE
Le Syndicat Ain Aval & Affluents (SR3A) est le premier Epage reconnu du bassin Rhône Méditerranée. Il assure la gestion de 1 300 km de rivières.
Le Syndicat Ain Aval & Affluents (SR3A) est la première structure ayant obtenu, en février 2019, au terme d’une procédure qui a duré presque un an, sa reconnaissance en tant qu’établissement public d’aménagement et de gestion des eaux (Epage) sur le bassin Rhône Méditerranée. Créé au 1er janvier 2018, ce syndicat réunit 8 EPCI qui lui ont transféré l’intégralité de la compétence Gemapi sur tout leur périmètre concerné par le bassin versant. Le territoire (150 communes, 150 000 hab.), à cheval sur l’Ain et le Jura, couvre plusieurs sous-bassins versants.
« La mutation qui s’est opérée est l’aboutissement d’un travail de fond sur trois ans. Tout le monde a compris l’intérêt de gérer les rivières à une échelle cohérente de bassin versant. Nous avons réussi à concilier cela avec des enjeux de proximité, grâce à une gouvernance adaptée, et en permettant aux membres de désigner des référents communaux. Ceux-ci constituent le lien entre les communes et le syndicat », détaille Alain Sicard, président du SR3A. Le projet s’est monté avec un consensus sur un montant de cotisations de 6,40 € par habitant. Une partie des membres le finance par la taxe Gemapi, les autres sur leur budget général.
La transition a eu lieu dans la continuité de l’action des 4 structures qui géraient par le passé les milieux aquatiques du territoire. La Gemapi a eu, au passage, l’avantage de faire disparaître les zones qui étaient dépourvues de gestionnaires. Les programmes de travaux lancés par les anciennes structures se sont concrétisés (3,5 M€ de chantiers réalisés en 2018) et les missions engagées se poursuivent, y compris sur le hors Gemapi (SAGE, ressource en eau, Natura 2000, animations scolaires…). «Notre cœur de métier, outre l’entretien, ce sont les projets de restauration hydromorphologique, le rétablissement de la continuité écologique, la renaturation de zones humides, la recréation de zones d’expansion des crues… De manière systématique, ces opérations cherchent à concilier intrinsèquement gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations, c’est la marque de fabrique de nos équipes », souligne Céline Thicoïpé, directrice générale des services. 
De nouveaux projets vont être lancés, notamment sur les diagnostics de systèmes d’endiguement. Il existe en effet 5 à 6 km de digues de catégorie C et quelques ouvrages écrêteurs de crue. En outre, des liens se renforcent avec la partie amont de la vallée de l’Ain, territoire sur lequel l’exercice de la Gemapi a été confié au parc naturel régional du Haut-Jura.  

Pour en savoir +
Les notes AMF 
• Les modalités de détermination de la taxe Gemapi. www.amf.asso.fr (réf. CW25577).
• Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations : (réf. CW14597). Stratégie d’organisation des compétences locales de l’eau : (réf. BW24137) et exercice de la compétence (réf. BW25070).
• Rencontre organisée dans le cadre de l’IPANCT à l’AMF, sur la solidarité territoriale et financière en matière de gestion des eaux, des milieux aquatiques et des risques associés (réf. BW24217).

Autres documents 
• «Étude relative à l’articulation entre l’exercice de la compétence Gemapi et les obligations des propriétaires riverains de cours d’eau », FNCCR.
http://www.fnccr.asso.fr
• «Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations », e-lettre aux acteurs du bassin Adour-Garonne.
http://www.occitanie.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/e-lettregemapi_1_decembre2017.pdf
• Guide Gemapi – Volet prévention des inondations, ministère de la Transition écologique et solidaire. https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/Guide_GEMAPI_inondations_2018.pdf
• Guide Introduction à la prise de compétence Gemapi du Cerema. https://www.cerema.fr 
• Les ouvrages de protection contre les inondations. CEPRI.  https://www.cepri.net/tl_files/Guides%20CEPRI/Guide_gemapi_PI.pdf

Formations 2019
Le catalogue de formation du CEPRI. http://cepri.net/actualites/items/Formations_2019.html

Fabienne NEDEY
n°367 - Avril 2019